DJ Cam, un artiste français à retenir dans l’actualité musicale de ces dernières semaines. Tout en étant rattaché à Columbia/Sony, DJ Cam a créé son propre label, Inflamable. Il n’en est pas à son premier album, et il a su se faire connaître dans beaucoup de pays. On lui doit Underground Vibes (95), abstract hip-hop & jazz; Underground Live Act (95), enregistré aux Transmusicales de Rennes; Substances (96), house, jungle & ambient; The Beat Assassinated (97), hip-hop & house et Loa Project (2000), hip-hop instrumental à tendance jazz.
Nous vous proposons de le découvrir ou de le redécouvrir au travers de l’interview que DJ Cam a accordé à MusicActu dans les locaux de Sony Music.
MusicActu : Même si j’ai cru comprendre que tu refusais de faire du surplace, est-ce-que tu pourrais définir globalement ton style, ne serait-ce que pour les gens qui découvrent DJ Cam aujourd’hui ?
DJ Cam : Eh bien c’est de l’abstract hip-hop ou hip-hop abstrait. Moi, j’appelle ça comme ça parce qu’on sample énormément de choses. Ma façon de travailler vient toujours du hip-hop et mes influences sont multiples. Après, tu essayes de faire un mix de tous les genres que tu aimes. Moi, ça va du jazz au dub en passant par la funk et la soul.
MA : De l’album Uunderground Vibes à Loa Project : hip-hop et jazz sont les ingrédients principaux de ces deux albums, et puis c’est de l’instrumental. Alors est-ce-qu’une boucle est bouclée ? Est-ce un retour volontaire ?
DJ Cam : Tu sais, j’ai des pseudos sous lesquels je fais de la musique un peu différente. Mais quand c’est hip-hop instrumental, abstract hip-hop, c’est vraiment DJ Cam. Dans le précédent album, The Beat Assassinated, j’avais mis beaucoup de lyrics, et les gens ont eu du mal à associer les deux. Donc maintenant, je suis revenu à quelque chose de plus instrumental. Cela dit, les ventes varient en fonction des pays : avec plus de lyrics, donc dans un style plus hip-hop, on a cartonné aux Etats-Unis. En tout cas, même si Loa Project reste proche du premier album, il est dix fois plus ouvert. Le premier était très jazz, là ça part un peu partout. C’est un peu comme une musique de films, c’était le but…
MA : Ton label, Inflamable, comment s’organise-t-il ? Quelle est son actualité ?
DJ Cam : C’est un label qui m’appartient à 100%. Au début, il s’appelait Street Jazz. En 95, il a changé de nom, à partir de la sortie du Underground Live Act en fait. Sur Inflamable, il y a une quarantaine de disques qui sont sortis, autrement dit ceux des artistes que j’ai produits et les miens.
MA : Et est-ce-que ces artistes sont un peu connus ?
DJ Cam : Non. La plupart des disques que j’ai sortis , c’est du vinyl. Donc leur diffusion est restreinte. Ca ne passe que dans les clubs spécialisés ; pas à la radio, pas à la télé, malheureusement.
MA : Inflamable, c’est aussi un site Internet, je crois
DJ Cam : Oui, Inflamable.com. Il existe depuis un an à peu près, et les connexions, c’est de l’ordre de 4000 / semaine. Sur ce site, il y a tous les disques qui sont sortis sur Inflamable. Il n’y a rien d’autre. Moi, je ne voulais pas de site avec de la musique. Je trouve que la plupart des disques qu’on a sortis sont composés de morceaux très différents. Et tu ne peux pas tous les mettre, seulement des extraits, alors je trouve ça trop réducteur. Sur le site, tu as donc tous les groupes sortis, les tracklistings et les références de leurs disques, une page d’actualité, et puis tu peux laisser des messages.
MA : J’aimerais maintenant qu’on parle un peu de ton travail en lui-même. Pour commencer, comment composes-tu un morceau, techniquement ?
DJ Cam : C’est très simple : je pars d’un sample mélodique, après je fais la rythmique, la basse, les arrangements, ensuite je vais en studio, je mixe le tout, et à la fin je rajoute les scratches. C’est toujours comme ça : un sample mélodique court, et après je fais tout dessus, je fabrique le reste moi-même. Ce sample, ça peut être une boucle de piano ou une boucle de basse.
MA : Comment naît une mélodie ? Est-ce-que c’est plus un air qui t’a trotté dans la tête et que tu essayes de mettre en forme, ou alors est-ce-que tu t’amuses à mélanger plusieurs sons un peu comme ça te vient ?
DJ Cam : Un peu des deux en fait. C’est parfois du feeling, et d’autres fois tu as des idées bien définies dans la tête. Tu commences à te dire : « tiens, je vais mettre telle rythmique, je vais mettre tel style de basse, tel sample… ».
MA : Ta vision du public par rapport à ta musique : est-ce que ça t’arrive de l’imaginer dans tel ou tel état d’esprit quand il va écouter un morceau précis, ou bien est-ce-que tu vois ta musique comme une manière de « s’évader » un peu unique pour chaque personne qui l’écoute ?
DJ Cam : Ce qui arrive, quand tu fais le morceau, c’est que tu te dis : « tiens, ils vont penser à ça… ». Et puis tu discutes avec les gens, tout le monde te sort des trucs un peu différents, donc tu t’aperçois qu’en fait, quand il n’y a pas de paroles, chacun peut imaginer ce qu’il veut. Il n’y a pas de carcan, c’est bien, pas de ligne directive. Mais bon, il y a aussi des gens qui ont besoin de messages dans la musique. Donc là, c’est moins parlant. Tu as des gens, si il n’y a pas de paroles, de couplets et de refrains, ils n’accrochent pas…
MA : Tu collabores également avec d’autres artistes, comme par exemple Bob Sinclar, mais lui, c’est un artiste qui a fait quelques morceaux connus, diffusés en discothèque et à la radio. Une collaboration un peu hors du commun…
DJ Cam : Dans mes projets, c’est Reminiscence Quartet quand c’est brésilien, Mighty Pop pour tout ce qui est hip-hop instrumental, et Bob Sinclar dans les projets house. Bob Sinclar, c’est de la house assez « happy « . Qu’est-ce-que tu veux, il y a plusieurs facettes ! C’est super bien fait. Chris, c’est mon pote. On a nos bureaux au même endroit, on a la même structure, on travaille ensemble tous les jours. Bob Sinclar, c’est très bien fait. Il faut avoir le truc : Chris, il l’a, il a cette qualité, moi je l’ai pas. Faire ce qu’il fait, c’est pas donné à tout le monde. Maîtriser des styles aussi différents comme ça, c’est fort !
MA : Il y a aussi Daddou du groupe de rap toulousain KDD, avec qui tu as fait le morceau « l’Invasion » sur The Beat Assassinated. Comment l’as-tu rencontré ?
DJ Cam : On est sur le même label, Columbia. On se connaissait depuis longtemps. On est arrivé chez Sony à peu près à la même époque et puis eux, ils sont quand même très cool. J’aime bien la manière dont ils rappent. Moi, j’ai jamais eu envie de faire du rap français, mais eux, je les trouvais vraiment intéressants. Daddou a un pur flow, une pure voix…
MA : DJ Cam / KDD, c’est donc encore une autre collaboration inédite ! De manière générale, tu ne penses pas qu’en France, il y a trop peu de collaboration entre les artistes rap et les artistes plus électroniques ?
DJ Cam : C’est clair, ça n’arrive jamais. Les KDD, eux, ils sont très ouverts. Ils ont bossé avec Jean-Michel Jarre, tout en restant intègres, c’est ça qui est bien. Les rappeurs pourraient faire des trucs sur de la house. Aux Etats-Unis, il n’y a aucun clivage entre les styles, tu as des producteurs qui font un jour de la house, le lendemain du hip-hop, et voilà ! Il n’y a pas de problème. Il faut arrêter de penser que ceux qui font de la house sont tous gays ! En tout cas, c’est vrai qu’il n’y a jamais eu de mecs de la scène électronique depuis « l’Invasion » qui ont fait des trucs avec des rappeurs…
MA : Pour terminer, as-tu des tournées, des concerts en prévisions? Est-ce-qu’on peut te voir souvent sur scène ?
DJ Cam : En fait, il y a deux choses : les formations live avec de vrais musiciens, et les tournées DJ, où je suis tout seul aux platines dans des clubs. Côté live, je n’ai fait qu’un concert, c’était aux Transmusicales en 95. Mais j’attaque une tournée très bientôt ; on sera cinq sur scène : un pote DJ (Science), un MC (MC OTIS) qui était sur le dernier album, un joueur de tablas (Shyamal Maitra Percus) et un trompettiste de jazz (Alexandre Tassel Trompett). C’est entre le live pur DJ Cam et l’esprit sound-system (house et jungle). En première partie, ce sera Demon, sorti sur Sony. Il fait de la house avec un esprit, pas que de la house pour danser. Et puis du côté des tournées DJ, j’ai dû faire dix fois le tour de la Terre, tous les clubs intéressants de la planète. J’ai fait notamment trois tournées au Japon et toutes les grandes villes des Etats-Unis. Je compte continuer, tant que ça se passe bien, que Sony me paye mon cachet (j’ai un contrat de licence ici , et j’ai pas de pression) et que les conditions sont adéquates pour ce genre de musique, parce que ça c’est important.
MA : Et sur Paris en particulier, tu mixes dans certains clubs ?
DJ Cam : J’ai fait le Queen, les Bains-Douches, j’ai tout fait mais je referai plus. Plus à Paris.
MA : Dernière question : on peut savoir ce que DJ Cam écoute en ce moment ?
DJ Cam : Le dernier album de Saint-Germain, J 88, du hip-hop américain, Rahdigga, une fille qui était avec Busta Rhymes et qui vient de sortir un album, « Dirty Ariette », et côté rap français, le live d’NTM ; j’adore NTM, j’écoute ce groupe depuis très longtemps, NTM et tout ce qu’ils font à côté, For My People et B.O.S.S..
Records Release
« The Loa Project » volume 2
DJ Cam’s New CD
Audio CD. 12 new tracks
coming out on 3rd May 2000
« The Loa Project » volume 1
CD Rom for Mac/PC
Enter the world of the Loa Project. Films, interactions and new sounds.
coming out on 15 September 2000
« DJ Cam Sound System »
New Single
from The Loa Project vol2
Remixed by Demon
coming out on 9 May 2000
« Voodoo Child »
featuring AFU-RA. DJ premier remix.
coming out on 15 May 2000