Skyrock – Entretien avec Pierre Bellanger

C’est en 1980 que Pierre Bellanger s’est lancé dans l’aventure de la FM, d’abord en participant à la création de Radio Paris 80, puis en lançant Radio Cité Future, le 10 mai 1981, en association avec Le Monde. Le 18 janvier 1983 débutent les premières émissions de La Voix du Lézard, ancêtre de Skyrock. Ce réseau national verra le jour en 1985 et débutera ses émissions à Paris le 21 mars 1986. En 1999, la société de participation Orbus, détenue par Morgan Grenfell Private Equity et par Pierre Bellanger, qui la préside, acquiert l’intégralité du capital de Skyrock et de Téléfun à Hachette Filipacchi Médias.

RadioActu : Le grand cheval de bataille de Skyrock actuellement concerne les fréquences attribuées à votre station. Vous avez publié cette semaine une pleine page de publicité dans Libération pour réclamer une fréquence sur Belfort. Quelles sont les retombées de cette opération ?
Pierre Bellanger : En ce qui concerne le CSA, ils sont en plénière par rapport aux attributions en Bourgogne Franche-Comté. Si cette communication doit avoir une influence, on en verra le résultat dans le sort qui nous sera fait. Je suis résolu.

RA : Si aucune fréquence n’était attribuée à Skyrock, quelles suites envisagez-vous de donner à votre action ?
PB : Nous poursuivrons notre action pour l’égalité de traitement et nous ne resterons pas inertes comme nous l’avons déjà montré, alors que les équilibres les plus élémentaires ne sont pas respectés.

RA : A quoi tient, selon, vous, ce déséquilibre entre Skyrock et les autres grands opérateurs nationaux ?
PB : Il y a deux raisons essentielles. La première, c’est que l’on nous fait subir les mêmes a priori que ceux de la génération qui nous écoute, et que par ailleurs le CSA, a contrario de sa mission de pluralisme et de diversité, a continué de favoriser l’émergence de trois groupes omniprésents. Par conséquent, Skyrock ne peut être que pris pour cible dans ce contexte là. Vous avez 11 réseaux qui ont une audience supérieure à 1.5 million d’auditeurs par jour qui sont contrôlés par ces trois groupes, la seule exception en est Skyrock. Donc, parler de diversité ce n’est pas multiplier des radios associatives, certes respectables, mais d’audience faible. C’est aider et laisser normalement se développer un véritable concurrent de ces trois groupes. Or, ce n’est pas ce que fait le CSA.

RA : C’est étonnant de vous entendre dire que le CSA ne devrait pas privilégier les associatives…
PB : Ce n’est pas ce que je dis. Je dis simplement que les associatives sont un cache-sexe d’une absence de pluralisme. C’est-à-dire que lorsque le CSA dit « regardez toutes ces radios associatives… », compte tenu de leur faible audience globale, ces stations servent d’argument au CSA pour cacher le fait qu’une véritable alternative de forte audience à ces trois groupes dominants est étouffée. Mon propos n’était pas contre les radios associatives, mais de démontrer qu’elles étaient instrumentalisées pour servir de substitut à un véritable pluralisme.

RA : Selon le CSA, Skyrock couvre 32 millions d’habitants, soit l’équivalent de Chérie FM, RTL 2, RFM ou RMC Info. On ne peut pas dire qu’il y ait une véritable inégalité de traitement ?
PB : Il y a inégalité de traitement parce que le jour où RMC Info sera première à Paris, où Chante France fait mieux que RMC Info, il faut savoir de quoi on parle. Donc il faut raisonner avec des programmes d’audiences et d’attraits équivalents vis-à-vis du grand public. Lorsque vous parlez d’RMC Info, vous avez une station qui a des scores d’audience qui ne justifient pas qu’elle puisse être choisie à la place de Skyrock là où il manquerait une station. D’autant plus que c’est une station d’information « généraliste » parmi d’autres, alors que Skyrock est parfaitement unique à la fois dans sa programmation musicale et dans son rôle de lien social et de plate-forme d’expression entre ses auditeurs. Quant à RFM, ou d’autres, ces stations appartiennent au triopole et donc que les groupes Bertelsmann, Lagardère ou NRJ qui ont déjà des centaines de fréquences. Dans un esprit de pluralisme et de diversité, quand vous avez un acteur important, majeur, qui se développe et qui a des centaines de fréquences de retard, là encore il y a un équilibrage qui doit être fait. Lorsque vous avez une station comme Le CSA doit respecter l’intérêt du publicRMC Info, l’aspect audience est déterminant. Cette audience représente l’intérêt du public et le CSA est en charge de respecter cet intérêt. Il doit le traduire dans les attributions de fréquences, ce qu’il ne fait pas. Donc, aujourd’hui on a un réseau qui fait 32 millions de couverture contre 42 à peu près pour NRJ, et cet écart de 10 millions est une injustice flagrante qui doit être résolue. C’est une anomalie de la République. Dans une cinquantaine de villes, des décisions du CSA ont été annulées par le Conseil d’Etat et chaque jour qui passe, cette anomalie devient de plus en plus insupportable. Avec la publicité que j’ai fait paraître, nous sommes face à un épisode.

RA : Pour prendre le cas de Montpellier, vous étiez présents sur cette ville dans les années 90, pourquoi la diffusion de Skyrock a t’elle été arrêtée ?
PB : Nous étions sur une fréquence qui a été supprimée puis réattribuée à un autre opérateur. Je ne crois pas que nous étions avec Chassaing (NDLR : directeur de la station Radio Alligator). C’est toujours facile, dans un contexte qui était celui des débuts de la FM, où il y avait une sorte de bricolage général et que l’on souhaitait trouver la faute chez quelqu’un, on la trouvait. Quand, dès lors que l’on voulait démontrer que tel ou tel n’était pas en conformité, c’était assez aisé. On l’a donc trouvée chez nous plutôt que chez un autre. C’est de la discrimination.

RA : Vous avez également des relations difficiles avec certains de vos franchisés, notamment en Bretagne et Pays de Loire, qui envisagent de diffuser un programme propre. Qu’en est il aujourd’hui ?
RA : L’essentiel des opérateurs ont choisi avec nous la voie de l’acquisition de nos stations filiales. Nous étions déjà présents dans leur capital et nous avons voulu contrôler notre réseau, et donc racheter les participations à tous les opérateurs, ce qu’on a fait pour la plupart d’entre eux, à l’exception en effet – pour l’instant – d’un ou deux, qui, ne pouvant vendre à des tiers, s’agitent et pensent que leur degré de nuisance sera synonyme d’un rendement financier. Je les laisse s’agiter.

RA : Ils évoquent des difficultés de commercialisation de l’espace en raison du format de Skyrock…
PB : Je crois que c’est surtout leur médiocrité à le commercialiser, compte tenu que les stations que nous gérons par nous-mêmes dans toute la France sont des stations rentables. Par conséquent, je pense qu’il y a là plutôt un constat sur leur incapacité plutôt que sur la réalité des choses, étant donné que nous sommes maintenant avec des partenaires en local, comme Ian Travaillé (NDLR : Magnitude Régie) qui sont des professionnels reconnus de ce métier. Nous exploitons nos stations en local et ça marche très bien. Je fais donc un constat d’incompétence.

RA : En clair, le format de Skyrock est un faux problème ?
PB : Il s’agit en fait d’un chantage proche de l’extorsion de fonds. Nous sommes pas du tout sur un problème de format.

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