Le Conseil a écrit au Premier ministre, au sujet du projet de loi relatif à la sécurité et au développement des transports qui consacre, en son article 14, la notion de service public d’information routière, la lettre suivante :
« Monsieur le Premier ministre,
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel a pris récemment connaissance du projet de loi relatif à la sécurité et au développement des transports qui consacre, en son article 14, la notion de service public d’information routière et prévoit que les personnes qui seront chargées de l’exécution de cette mission bénéficieront d’un droit de priorité pour l’attribution, par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, des fréquences radiophoniques nécessaires à leur mission.
Le Gouvernement envisage ce cadre juridique pour développer et pérenniser progressivement le système des radios d’information d’autoroute, dont l’utilité est reconnue en matière de sécurité routière et de confort des usagers des autoroutes, à tous les grands axes routiers, qu’ils relèvent ou non du domaine public de l’État, ainsi qu’aux principales agglomérations métropolitaines.
La loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication prévoit (articles 26 et 44) un droit de priorité au profit de Radio France, pour l’exercice de ses missions de service public. Il serait complété afin de bénéficier également aux personnes morales chargées, dans le secteur radiophonique, d’une mission de service public d’information routière.
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel, bien que n’ayant pas été saisi pour avis de ce projet de modification de la loi du 30 septembre 1986, souhaite néanmoins appeler votre attention sur les points suivants.
Avant toute chose, il semble important de rappeler que le Conseil s’est toujours montré attaché au développement des radios d’information routière qu’il soutient depuis 1991. Ainsi, la fréquence 107,7 MHz est attribuée aux radios d’autoroutes, le Conseil n’ouvrant jamais d’appel aux candidatures sur cette fréquence aux autres catégories de services privés, associatifs ou commerciaux.
Très soucieux de préserver la mission dévolue à ces radios d’information routière, le Conseil supérieur de l’audiovisuel s’inquiète néanmoins de l’usage qui pourrait être fait de ce nouveau droit de priorité.
En effet, dans la perspective du lancement d’appels à candidatures, entre 2006 et 2008, portant sur 57 % des fréquences attribuées aux radios privées, le Conseil a engagé, en liaison avec la Direction du développement des médias et les acteurs du paysage radiophonique, un travail d’optimisation du plan de fréquences qui pourrait conduire à opter, sur certains axes, pour une fréquence autre que la fréquence 107,7 MHz.
A cet égard, le Conseil supérieur de l’audiovisuel se félicite que la fréquence 107,7 MHz n’ait pas été expressément mentionnée dans le projet de loi, la réserve d’une fréquence ainsi désignée pouvant paraître excessive au regard des contraintes techniques inhérentes à la diffusion par voie hertzienne terrestre. Il émet le souhait que le décret d’application de la future loi préserve également cette neutralité afin que le Conseil soit le mieux à même de remplir la mission que lui confie la loi de veiller à la meilleure utilisation possible des fréquences radioélectriques.
Enfin, le Conseil supérieur de l’audiovisuel souhaite attirer votre attention sur les conditions d’exercice du droit de priorité prévu afin que ce dernier n’ait pas pour effet de remettre en cause l’équilibre actuel du paysage radiophonique (sur les 5 800 fréquences planifiées, 2 400 sont déjà attribuées à Radio France et environ 1 070 opérateurs privés se partagent 3 400 fréquences).
Le risque d’une telle déstabilisation lui apparaît d’autant plus élevé que le droit de priorité prévu dans le projet de loi ne semble pas avoir vocation à s’appliquer à une diffusion sur les seuls axes routiers et autoroutiers. Les bénéficiaires du service public ainsi envisagé pourraient obtenir des couvertures locales ou nationales, notamment dans les principales agglomérations métropolitaines, qui seraient susceptibles de concurrencer d’autres programmes publics ou privés qui sont nombreux à attendre de pouvoir compléter leur bassin de diffusion. »
27 octobre 2005Assemblée plénière du 18 octobre 2005