RadioActu : Comment se porte aujourd’hui le service public ?
François Desnoyers : Nous avons une grande stabilité sur une période plusieurs années, même on si on ne peut pas comparer techniquement. on peut se référer aux éléments antérieurs sans faire de comparaison strictement arithmétique. Ce qui ressort, c’est que nous savions que l’élargissement de la base sur les 13 et plus allait affecter nos principaux réseaux, France Inter, France Info et France Bleu, mais en réalité, ça ne les affecte que très peu et en même temps nous ne perdons pas d’audience. En volume d’auditeur moyens, on en recense un peu plus, mais nos chaînes ne sont pas extrêmement ciblées sur les adolescents. La variation existe mais elle est limitée. Nous ne faisons pas de segmentation par l’âge, et à l’exception du Mouv’, il n’y a pas d’offre particulière du service public vers les jeunes. En revanche, notre offre, par définition est ouverte à tous et nous n’allons pas faire de jeunisme pour autant. L’offre du service public est essentiellement destinée aux adultes, mais France Info est par exemple une chaîne qui est bien écoutée par les jeunes, mais pas forcément les adolescents. Nous n’allons pas surpondérer nos contenus parce que la base a été élargie aux 13-15 ans. Nous sommes sereins car nous voyons que dans un paysage qui bouge, Radio France est extrêmement stable. A l’autre bout du tableau, et dans un tout autre style, nous avons de bons résultats pour France Culture et France Musiques, ce qui prouve qu’on ne peut pas ramener la radio à une équation simple entre radios musicales et radio d’information. Il y a de la place pour tout le monde et il ne faut hystériser le débat.
RA : Quels sont les résultats du Mouv’, chaîne destinée à un public plus jeune ?
FD : Le Mouv’ est présent, mais n’apparaît pas dans les communiqués. La station n’est diffusée que dans 13 villes en France. Il y a donc un effet de taille et Le Mouv ‘ n’a pas de couverture nationale. On trouvera Le Mouv’ dans les résultats Paris IDF par exemple dans 15 jours. Le développement de la couverture du Mouv’ n’est pas lié à Radio France mais à la rareté des fréquences. Radio France est potentiellement demandeur de nouvelles fréquences pour le Mouv’. Cette rareté des fréquences ne permet pas au CSA de nous attribuer des fréquences. Nous avons eu de nouvelles fréquences et j’espère qu’à l’avenir nous en aurons d’autres. Par ailleurs, le paysage radio a changé, comme il change depuis 20 ans, mais il ne se passe rien de particulier en direction des jeunes. C’est simplement plus visible aujourd’hui parce qu’il y a un élargissement vers les 13-15 ans. Par ailleurs, parce que NRJ est une maison qui marche très bien et que de façon générale, les musicales jeunes et adultes marchent plutôt bien, mais il n’y a pas de donne véritablement nouvelle. Nous n’avons pas à paniquer en raison de l’élargissement aux 13 ans et plus. On sait que mécaniquement cela a un impact minorant en proportion de 0.2 à 0.3% environ, mais ça ne change pas le volume total de nos auditeurs, qui est plutôt en augmentation, ni nos positions dans l’audience cumulée. A l’instar d’Europe 1 ou RTL, nous attachons également beaucoup d’importance à la part d’audience, et France Inter est toujours deuxième en part d’audience.
RA Comment analysez-vous les affrontements entre NRJ et RTL ? Comment Radio France a t’elle appréhendé l’élargissement vers les 13-15 ans ?
FD : Au sein des travaux de Médiamétrie, nous avons toujours été extrêmement modérés, d’abord pour ne pas tomber sous la dictature du jeunisme. Ce débat remonte à plusieurs années, et nous ne souhaitions pas une ouverture à n’importe quel prix au prétexte de favoriser tel ou tel opérateur qui faisait des radios musicales jeunes. Inversement, nous avons été de ceux qui ont amené l’idée que l’on ne peut plus contester le fait qu’il y a des auditeurs de moins de 15 ans. Nous avons voté cet élargissement vers les 13 ans et plus mais nous avons aussi été de ceux qui avaient souhaité que le mouvement ne se précipite pas, car il n’y a pas que les jeunes dans cette histoire. De ce Le débat a été totalement hystérisé par le groupe NRJpoint de vue, le débat a été totalement hystérisé par le groupe NRJ. Le groupe NRJ défend ses intérêts, c’est normal mais la focalisation excessive sur cette question était totalement disproportionnée par rapport à la réalité. Aujourd’hui, nous sommes dans une mesure qui nous semble tout à fait correcte et représentative de ce qu’est le marché de la radio. Nous n’avons pas à intervenir dans la polémique entre Baudecroux et Leproux, mais il est clair qu’on ne peut pas contester qu’il y a une radio qui est une référence du marché, que ses auditeurs lui sont extrêmement fidèle et qui est leader en part d’audience, c’est RTL. Et de ce point de vue là, il y a vraiment eu une agression délibérée contre RTL et c’est dommage. Nous avons toujours plaidé pour un vrai dialogue interprofessionnel, chacun faisant son travail à la loyale. Sur la question de la part d’audience et de l’audience cumulée, nous avons besoin des deux indicateurs pour apprécier les choses. Pour France Info, on regarde l’audience cumulée, pour France Inter, on regardera plutôt les deux indicateurs. Ce qui nous semble dommage c’est la tentation qu’auraient certains de et le bébé avec l’eau du bain avec un discours simpliste qui serait que les généralistes sont finies et que le marché est segmenté par genres musicaux et par âge. Ce n’est pas la réalité et c’est bien plus compliqué que ça. Ce qui est vrai, c’est que chacun doit faire un effort de clarification de sa position vis à vis de ses publics.
RadioActu : Jean-Marie Cavada est favorable à la mise en place du système de mesure RadioControl développé par la Radio Suisse Romande. Quelle est la position de Radio France par rapport aux sytèmes de mesures d’audience actuels ?
FD : La vraie limite à ce système est son coût. Le déclaratif surpondère l’effet de marque, c’est à dire que lorsqu’une marque à une présence mentale forte, il est évident que les personnes interrogées font référence aux marques qu’elles connaissent. C’est aussi pour clarifier notre présence que Jean-marie Cavada s’est lancé dans une politique de marques, avec France Bleu ou Le Mouv’. Le RadioControl présente l’avantage d’être froid comme une machine et mesure ce qui parvient dans l’environnement de l’auditeur. Nous suivons de près les travaux de la RSR, mais il est vrai qu’il y a un problème de coût
RA : Quelle est aujourd’hui la position du service public dans le paysage radiophonique français ?
FD : Nous sommes clairement dans un marché mixte où il y a un service public important, mais pas dominant et surtout indispensable. Dans le cas de Radio France, nous avons la chance d’avoir une offre particulièrement large et nous croyons à la diversité. Nous sommes dans un marché concurrentiel, où nous sommes en compétition avec des opérateurs privés et en même temps, le service public est aussi là avec des chaînes à forte audiences, et pas seulement sur des offres très pointues comme Musiques ou Culture. Le service public est aussi là pour garantir des missions importantes, dans le domaine de l’information, de la découverte des nouveaux talents, dans le domaine culturel et du débat d’idées, qui font la richesse de nos antennes. Le service public de la radio en France se porte bien et est respecté. Jean-Marie Cavada a beaucoup fait pour ça. Nous ne sommes pas une vieille administration qui fait de la radio, mais nous sommes une entreprise qui est reconnue pour sa performance et son innovation. Regardez France Info, Le Mouv’, ou plus récemment la City Radio pour France Bleu.
RA : Votre discours est très volontariste, mais comment est il perçu au sein de Radio France ?
FD : Il y a des lourdeurs, mais ce discours est bien mieux compris que par le passé. C’est avec le personnel que s’est fait France Info, et pas avec quelques dirigeants dans un coin, c’est avec les équipes que s’est fait le Mouv’, de même, les radios locales n’auraient pas le poids Ce qui fédère tout le monde, c’est la pratiquequ’elle ont aujourd’hui s’il n’y avait pas ces 42 équipes qui oeuvrent sur le terrain. Quelquefois, il y a des différences de sensibilité, mais ce qui fédère tout le monde c’est la pratique. Chaque fois que cette maison a entrepris, elle a réussi. Elle est quelquefois hésitante à entreprendre ou longue à se mettre en marche, mais Jean-Marie Cavada pense que toute publique qu’elle soit, elle n’a aucune raison d’avoir peur d’innover. Elle sait le faire vite et bien quand le moment se présente.
RA : Quels sont les prochains grands chantiers de Radio France ?
FD : Le plan Bleu continue, avec les créations de locales comme à Metz, Nice, Tulles ou encore Evreux. Dans la foulée l’année prochaine Toulon et la Roche-sur-Yon. Il y a un peu de retard, mais nous sommes dans une phase moins spectaculaire. L’autre chantier important, c’est la numérisation. A terme, toutes les unités de production et diffusion doivent être passées à la technologie numérique. Il y a d’abord toute la partie non visible, y compris pour les personnels. qui s’est construite : les liaisons et les réseaux de contribution entre les stations. La numérisation continue, radio locale par radio locale, la chantier de France Inter commence, toutes les chaînes vont y passer. Pour le coup, c’est un chantier structurant et très important mais qui ne peut pas être spectaculaire car ce sont plusieurs années de travail. La demande de numérisation est très forte. Aujourd’hui, les choses qui sont contestées par les organisations syndicales, c’est que ça ne va pas assez vite, car les gens de radio savent ce qu’apporte le numérique et ils ont envie d’avoir très vite d’avoir ces outils.
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